11/06/2024

Reprendre en main sa santé avec les LHSS

En 2014, l’Îlot inaugurait son premier dispositif Lits halte soins santé (LHSS) - dit « résidentiel » - au sein du Centre d’hébergement et de réinsertion sociale les Augustins à Amiens, pour permettre d’assurer la continuité des soins médicaux à des personnes en situation de grande précarité, qui n’ont pas de toit et ce, quelle que soit leur situation administrative.

Qu'est-ce que les LHSS ?

Les LHSS, « établissements et services sociaux et médico-sociaux, au titre du 9° de l'article L.312-1 du CASF, consacré par la loi 2002-2 rénovant l’action sociale et médico-sociale » (1), sont des structures de soins à but non lucratif dont la mission est d’offrir une prise en charge des personnes requérant des soins. Ces établissements de soins sont dédiés à des personnes sans domicile fixe dont l'état de santé est incompatible avec une vie d’errance dans la rue et nécessitent des soins, type soins infirmiers à domicile ou des soins de suite et réadaptation, de stabilisation, mais qui ne peuvent justifier une hospitalisation. Il s’agit d’une prise en charge globale, car en plus du suivi des soins et de la surveillance médicale, les personnes accueillies dans un dispositif LHSS bénéficient également d’un accompagnement social.

Le dispositif de Lits halte soins santé doit être intégré à une structure préexistante. Dans le cas du LHSS résidentiel de l’Îlot, celui-ci est intégré au Centre d’hébergement et de réinsertion sociale les Augustins pour les lits de soins dédiés aux hommes et au Centre d’hébergement et de réinsertion sociale Thuillier pour ceux dédiés aux femmes. La capacité d’accueil maximum autorisée par l’ARS d’un dispositif LHSS est des 30 lits de soins.

Les Lits halte soins santé jouent un rôle essentiel de cohésion sociale en évitant une rupture dans la continuité des soins des personnes sans domicile et en prévenant l’aggravation de leur état de santé. Afin de s’en assurer, la durée de séjour - généralement limitée à deux mois - peut être prolongée en fonction de l’évolution de l’état de santé de la personne accueillie.

Les Lits Halte Soins Santé (LHSS) fonctionnent avec une équipe pluridisciplinaire pour assurer une prise en charge globale et complète des personnes accueillies. Ainsi l’équipe du LHSS résidentiel de l’Îlot se compose :

  • d’une responsable de service ;
  • d’un médecin coordinateur responsable de la coordination et le suivi des soins ;
  • d’infirmiers diplômés d’Etat chargés de promouvoir la santé par des soins et par des actions de coordination et d’éducation thérapeutique ;
  • une référente sociale ;
  • de travailleurs sociaux : assistantes sociales et éducateurs spécialisés, ils s’attachent à l’accompagnement des personnes admises en LHSS, majoritairement en perte d’autonomie, dans leurs démarches administratives et organisent des activités pour favoriser le bien-être et la réinsertion sociale des patients.
  • une médiatrice santé en charge d’accompagner les personnes dans les actes de la vie quotidienne et de développer la promotion à la santé par des actions de prévention en lien avec les partenaires et les institutions.

Cette équipe pluridisciplinaire permet de répondre aux multiples besoins des personnes sans domicile fixe nécessitant des soins médicaux et un accompagnement social. Pour coordonner leurs actions, les équipes médicales et soignantes, ainsi que les travailleurs sociaux se réunissent régulièrement pour discuter des cas des patients, faire des évaluations de leur évolution et orienter la prise en charge médicale comme sociale.
Les équipes du LHSS collaborent étroitement avec des structures de soins extérieures telles que les hôpitaux, les centres spécialisés en addictologie, des psychologues, ainsi que les services sociaux pour assurer un parcours de soins optimum.

Qui peut être pris en charge par les LHSS ?

Les Lits Halte Soins Santé (LHSS) sont destinés à accueillir des personnes majeures sans domicile fixe, c’est-à-dire des personnes vivant à la rue, dans des squats, des campements, ou dans des hébergements temporaires comme les Centres d’hébergement d’urgence (CHU). Ce sont ces derniers qui adressent principalement les patients dont l’état de santé nécessite des soins type soins à domicile sans relever d’une hospitalisation de jour ou d’une hospitalisation complète. Il s’agit de besoins de soins dits aigus, c’est à dire des pansements à changer, des sondes à placer et entretenir, etc. Les LHSS sont également ouverts aux personnes en situation de handicap.

« L’admission se fait sur avis du médecin de la structure qui évalue et identifie les besoins sanitaires de la personne accueillie, la pertinence médicale de son admission et exclut donc la nécessité d’une prise en charge hospitalière. » (1)

Mme M. a été accueillie sur le dispositif LHSS résidentiel en décembre 2021 à la suite d’une hospitalisation, pour conforter les soins engagés en milieu hospitalier (fracture du bras à la suite d’un accident sur la voie publique).
Avant cette prise en charge spécialisée en LHSS, Mme M. faisait appel au 115 et était hébergée au sein du dispositif d’urgence sociale depuis plusieurs mois, en alternance avec des solidarités et la vie en squat. Séparée, Mme M. a eu deux enfants, son premier fils est décédé très jeune, elle a gardé des relations régulières avec le second, lui -même hébergé dans une pension de famille à Amiens.

Sous curatelle d’état renforcée depuis 2012, nous avons pu travailler en étroite collaboration avec sa mandataire. Mme M. a retrouvé au sein de notre établissement un cadre rassurant et a réussi à se stabiliser le temps des soins. Elle s’est approprié ce lieu d’hébergement au fil des semaines, tout en maintenant ses habitudes de vie. Nous avons su nous adapter à son rythme, respecter ses besoins de sortir de l’établissement, fréquenter notre accueil de jour pour y retrouver ses compagnons de rue.

Les actions conjointes de notre équipe pluridisciplinaire, des partenaires extérieurs sollicités ont permis de faire alliance avec Mme M. à savoir :

  • éducation thérapeutique pour la prise de traitement ;
  • s’assurer que Mme M. retrouve de la mobilité par des séances de kinésithérapie ;
  • respecter son rythme afin de faire alliance avec Mme M., qui à son arrivée, était une personne très marginalisée.

Parallèlement, lorsque les soins de santé étaient bien engagés, nous avons travaillé avec les différents intervenants une orientation plus pérenne. Dans la vie quotidienne, nous avions noté que depuis plusieurs mois, elle portait un intérêt à participer à la vie sociale de l’établissement, l’entretien de la chambre était réalisé par ses soins. De plus elle manifestait de l’intérêt aux activités proposées par l’équipe éducative.

Au regard de son long parcours d’errance et afin de maintenir l’équilibre établi et l’observance médicale, nous avons poursuivi sa prise en charge globale afin d’éviter qu’elle fasse appel au 115. Avec sa tutrice, il été convenu qu’un logement autonome n’était pas envisageable ; Mme M. exprimant la même volonté. Après une année au sein de notre service, Mme M. a pu intégrer une Pension de famille, nous avons fait le lien, rencontré, présenté les intervenants pour effectuer un relais en douceur afin de lui permettre de se familiariser à son nouvel environnement.

L’accompagnement soutenu que nous avons proposé, la prise en compte de sa situation globale, l’intérêt porté à son état de santé, le respect de sa temporalité ont permis un maintien, une stabilisation évitant de nouveau une rupture et un retour dans l’errance.

Prise en charge par les LHSS : comment ça fonctionne ?

La prise en charge des patients dans les dispositifs de LHSS vise à aller au-delà d’un « simple » rétablissement médical mais à la réinsertion durable et réussie de la personne accueillie. Aussi les journées sont organisées dans ce but avec des moments dédiés aux soins de santé, d’autres à la resocialisation et enfin à l’accompagnement social afin de créer un projet de vie digne et réalisable.
Ainsi alternent :

  • les moments de soins médicaux quotidiens où les infirmiers s’assurent que les patients vont bien, relèvent les constantes, distribuent et vérifient la prise de médicaments, changent les pansements, et si nécessaire rappellent aux personnes accueillies les consultations externes médicales du jour ;
  • les moments de repos dans les chambres individuelles ;
  • les activités collectives pour favoriser la socialisation et le bien-être mental, telles – par exemples - qu’un barbecue ou une partie de bowling sur Wii partagés avec les résidents du CHRS ;
  • les rencontres avec les travailleurs sociaux pour discuter de leurs besoins, être aidés dans leurs démarches administratives, et préparer leur sortie du LHSS.

Les dispositifs LHSS sont – à l’instar d’un hôpital – ouvert en continue via une surveillance qui est assurée la nuit et pour assurer la sécurité et répondre aux besoins urgents des patients.

Quel financement pour les LHSS ?

Les dispositifs de financement des LHSS sont souvent créés à la suite à un appel à projet de l’Agence régionale de santé (ARS) qui identifie un besoin spécifique sur son territoire. L’ARS finance les LHSS via « l'Objectif national des dépenses de l'Assurance Maladie (ONDAM) spécifique médico-social et éventuellement des cofinancements, par une dotation globale définie sur la base d’un forfait par lit et par jour. Dotation réévaluée annuellement. » (1)

En plus de l’ONDAM, il peut y avoir des cofinancements provenant de programmes spécifiques, comme le « Programme 135 (crédits FNAP) pour les nouvelles structures. Les travaux d’amélioration et d’humanisation des structures peuvent être subventionnés par l’Agence Nationale de l’Habitat (Anah), notamment pour les associations et les organismes de logement social. » (1) Dans le cas du LHSS de l’Îlot, lorsqu’il s’agit d’un besoin ou d’un projet ponctuel, le dispositif peut solliciter des crédits non reconductibles après de l’ARS. Demande qui doit être argumentée, budgétée et justifiée in fine auprès de l’Agence régionale de santé.

Ces financements permettent aux LHSS de fonctionner de manière continue d’assurer un rôle dans la cohésion sociale en fournissant les soins nécessaires aux personnes sans domicile fixe.

Les LHSS mobiles

Pour étendre l’offre de soin à des publics en errance, l’Îlot a récemment lancé le dispositif LHSS Mobile qui va à la rencontre de femmes, d’hommes et de familles, de la région d’Amiens qui requièrent cette prise en charge globale, médicale et sociale.

(1)www.financement-logement-social.logement.gouv.fr

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