24/03/2025

Aide à l'embauche d'un ancien détenu

Pour l’Îlot, favoriser l’accès à l’emploi du public justice que nous accompagnons est particulièrement important. Il permet de prétendre à un logement autonome et s’y maintenir, il facilite les liens sociaux ou familiaux, donne un rythme et un cadre de vie, pour retrouver une place au sein de la société. Sans emploi, le risque de récidive est important.

Comment aider un ancien détenu à retrouver du travail ?

Du fait du faible niveau de qualification des personnes écrouées, « plus de la moitié des personnes détenues se situent au mieux à un niveau de fin d’études primaires et ne disposent pas de réelle qualification professionnelle. Le taux d’illettrisme de la population détenue est d'environ 10,5 %, Il est supérieur à la moyenne nationale. » (1), et de l’absence d’accès à internet en prison associée à la dématérialisation des démarches administratives, les personnes sortant de détention sont démunies face au marché de l’emploi.

Aussi des associations d’aide à la réinsertion, telles que l’Îlot, ont mis en place des programmes spécifiques pour faciliter la remobilisation pour un projet professionnel des personnes sortant de prison. Nous avons échangé avec des Chargés de mission emploi, des Conseillers en insertion professionnelle (CIP), des Encadrants techniques d’insertion (ETI) de l’Îlot sur la façon dont ils œuvrent pour faciliter l’embauche des personnes sortant de prison ou encore sous main de justice en aménagement de peine, qu’ils accompagnent.

« Etudiante j’ai participé à des maraudes, où j’ai rencontré de nombreux anciens détenus vivant à la rue. En discutant avec eux, j’ai découvert les difficultés qu’ils rencontraient pour se réinsérer professionnellement, en partie en raison de la complexité des démarches administratives.
C’est dans ce contexte que j’ai découvert l’Îlot et son approche globale. L’association combine plusieurs volets : l’hébergement, emploi et un accompagnement socio-professionnel approfondi. Cette approche tripartite me semblait essentielle pour assurer une réinsertion réussie. »
indique Ariane, Chargée de mission emploi en Île-de-France. « Le programme dedans-dehors démarre dès la détention, composé d’entretiens individuels pour lever certains freins et préparer le projet professionnel à la sortie. Ensuite, les bénéficiaires participent à des ateliers collectifs, où l’on fait par exemple des simulations d’entretien d’embauche ou des séances pour faire découvrir les métiers en tension.
Le but est de rendre l’accompagnement plus progressif et efficace, et assurer une passerelle vers l’emploi à l’extérieur. »
, Franck, chargé de mission emploi en Île-de-France, « À la Structure d’accompagnement à la sortie (SAS), dans le programme accéléré, nous voyons généralement trois à quatre personnes le matin, avec des entretiens d’une heure chacun.
L’après-midi, nous animons des ateliers collectifs avec un groupe de 8 à 12 participants.
Certains profils que j'ai accompagnés sont sortis tout dernièrement et mon contacter dès leur sortie, nous avons accentués les entretiens individuels, ils ont pour la plupart une sortie positive. C'est un encouragement car les parcours d’accompagnement dans les murs sont long... Parfois, au début de l’accompagnement, on est motivé, puis il faut les pousser, rester derrière eux, ne pas les lâcher pour qu’ils comprennent qu’ils sont à deux doigts de la sortie et qu’ils peuvent faire mieux. Il peut y avoir des difficultés au cours du parcours, mais l’accompagnement est là pour ça. »
« Il y a des gens qui vous sont adressés par les Conseillers pénitentiaires en insertion et probation (CPIP) et qui sont sur le point de sortir. L'idée, c'est qu'à la fin de la promotion, ils soient prêts à sortir normalement. La Structure d’accompagnement à la sortie (SAS) est destinée à des profils en fin de peine. Le but, c'est d'éviter une sortie sèche et la récidive, en leur permettant de sortir avec un projet d’emploi et donc de réinsertion. »
, conclut Ariane.

La levée des freins, un plan d’actions adapté aux compétences comme aux souhaits de la personne suivie, la préparation à la recherche d’emploi et aux entretiens, sont des étapes indispensables pour aider un ancien détenu à trouver un emploi dans lequel il sera à l’aise, retrouvera une estime de soi, des revenus, une place dans la société. Autant d’éléments qui concourent à éviter la récidive.

Où chercher du travail lorsqu'on est ancien détenu ?

Entre leur faible niveau de qualification, leur manque d’expériences professionnelles, et l’handicap lié à un casier judiciaire et ainsi qu’à un « trou dans le CV », la plupart des anciens détenus peinent à s’insérer dans le monde du travail. Les Chargés de mission emploi sont revenus avec nous sur des partenariats qui peuvent aider les personnes qu’ils accompagnent à accéder au monde professionnel.

« Au service des programmes de retour vers l’emploi nous avons des partenaires qui sont des prescripteurs, comme les Services pénitentiaires d’insertion et probation (SPIP) en grande majorité, mais aussi la Mission locale, France Travail, les espaces parisiens d'insertion (EPI) ou les agences locales d'insertion (ALI). », explique Ariane. « Je pense également à une entreprise qu'on a visitée il y a deux mois : une branche du groupe SEB, qui fait de la réparation d'électroménagers. C'est dans un programme de réinsertion, et ils emploient énormément de personnes de l’Insertion par l’activité économique (IAE), du public justice. Ce sont eux qui viennent vers nous en disant qu'ils ont des postes à pourvoir. C'est à la fois nous qui envoyons les CV ou nos bénéficiaires, et eux qui nous disent qu'une place se libère pour tel ou tel poste. C'est un réseau très vertueux pour les gens accompagnés. Cela implique un gros travail en amont pour les créer. Avec la responsable des programmes de retour vers l’emploi, depuis plusieurs mois, on s’impose de rencontrer un partenaire par semaine, et c'est important pour faire connaître l'Îlot. Les places en IAE sont de plus en plus réduites alors que les besoins sont de plus en plus nombreux, notre lien avec les SIAE est primordiale pour la réussite des participants."

Le suivi continu apporté par les chargés de mission emploi, ou les Conseillers en insertion professionnel (CIP) (lien vers article sur les CIP), comme l’activation de liens avec des entreprises partenaires, sont des appuis précieux pour les personnes sortant de prison et volontaires dans leur souhait de se réinsérer professionnellement.

Comment se former en tant qu'ancien détenu ?

Entre déficit de diplômes et d’expériences professionnelles qui freinent l’accès à l’emploi des anciens détenus, opter pour une formation est le moyen de maximiser la chance de s’insérer dans le monde du travail. En plus de l’accompagnement socio-professionnel et administratif approfondi qu’apporte l’Îlot aux personnes suivies, l’association dispose d’Ateliers et chantiers d’insertion (ACI), et Ateliers qualification-insertion (AQI) qui permettent à des personnes sortant de prison de se former à des métiers en tension.

  • Les chantiers d’insertion, qui offrent une première expérience professionnelle structurante. En intégrant ces chantiers, les bénéficiaires apprennent un métier tout en étant actifs sur le terrain. Ils sont encadrés par des professionnels expérimentés, formés à l’accompagnement des personnes éloignées de l’emploi, et bénéficient d’un suivi individualisé pour progresser à leur rythme. Les Ateliers et chantiers d’insertion de l’Îlot proposent d’acquérir des compétences dans la mécanique, carrosserie et nettoyage automobile, la restauration collective, le maraîchage, le codage informatique et le recyclage textile.
  • Les Ateliers qualification-insertion, qui permettent d’obtenir, en seulement neuf mois, une qualification d’employé polyvalent en restauration. Ce dispositif combine apprentissage théorique et mise en situation pratique, offrant ainsi aux participants une formation professionnalisante reconnue sur le marché du travail.

La difficulté pour les personnes sortant de prison, dont les moyens financiers sont de facto limités, est de pouvoir financer une formation. L’avantage des Ateliers et chantiers d’insertion, et Ateliers qualification-insertion est d’offrir aux personnes qui les intègrent le statut de salarié en Contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI) donc de bénéficier de revenus qui les libèrent d’un des freins périphériques au retour à l’emploi.

Comment inciter les entreprises à aider l'embauche des anciens détenus ?

L’Îlot par son maillage territorial, ses liens avec des entreprises pour obtenir des stages ou des entretiens, incite à l’embauche d’anciens détenus.
« Parmi la dernière promotion des Ateliers qualification-insertion d'agent de restauration collective, une personne au passé carcéral, qui n'avait pas travaillé depuis très longtemps, a pu développer un certain nombre de compétences, notamment lors de ces stages en entreprise. Cette personne a trouvé un CDI avant même la fin du parcours. » Marie, Conseillère en insertion professionnelle en Île-de-France.

« En plus de leur apprentissage et je les mets aussi en relation avec des garages. J’ai permis à un sortant de prison de décrocher un stage dans un garage de carrosserie-peinture Renault, qui a débouché sur un CDI. Une autre salariée de l’Auto-Bleue qui était une demandeuse d’emploi longue durée l’a rejoint dans cette concession et a, elle-aussi, décroché un CDI. Je suis heureux de cette ascension. En environ 7 mois, ils sont passés de néophytes à professionnels. C’est une belle réussite. », nous explique Florian encadrant technique d’insertion (ETI) de l’atelier carrosserie à Amiens.

La politique de la Responsabilité sociétale de l'entreprise (RSE) peut aussi aller dans le sens d’une ouverture pour l’emploi pour les personnes sortant de prison en les recrutant, en formant et développant leur employabilité. Les Directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) organisent également des rencontres avec des entreprises locales pour les inciter à embaucher des personnes sortant de prison.

D’autres initiatives souhaitent aussi favoriser l’embauche d’anciens détenus comme la chaire « Vivre Ensemble » de l’université de Rennes qui a pour mission de développer le "vivre ensemble" au sein des entreprises et sur le territoire dont l’embauche d’anciens détenus en Bretagne. Elle lance un réseau d’accompagnement ainsi qu’une brochure pour aider les entrepreneurs intéressés.

A l’Îlot nous ne pouvons que nous réjouir de voir émerger des volontés de faciliter l’intégration des personnes avec un passé carcéral dans le monde du travail, car l’emploi est un des premiers pas dans le chemin de la désistance.

(1) www.justice.gouv.fr

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