16/06/2014

Courrier de Christophe, ancien résident du CHU la Passerelle

"J'aurai passé 48 jours avec vous, qui parfois quand on ne va pas bien semblent interminables mais au fond j'ai eu beaucoup de chance de vous rencontrer".

Hébergé d'abord à La Passerelle, notre centre d'hébergement d'urgence à Amiens, Christophe a pris la plume pour remercier l'équipe.

C'était le 20 mai 2014 :
Arrivé à Amiens à 22h08 après deux jours de voyage en autostop, suite à une douloureuse rupture, j’ai un numéro en tête : le 115, et un espoir : dormir car je suis épuisé, aussi bien moralement que physiquement.

45 minutes d’attente, interminable ou tout au moins ressentie comme telle. Un véhicule arrive, des gens gentils me récupèrent et 10 minutes plus tard je suis accueilli à « La Passerelle » par le veilleur, souriant. Un repas chaud, un lit, et enfin dormir…

Le lendemain, petit déjeuner, rencontre avec l’équipe de jour à qui j’explique le pourquoi de ma présence. Ca y est, la machine est en route.
N’étant pas en bonne santé, fatigué, je rencontre l’infirmière qui apprenant que je suis à court de traitement me présentera un médecin, qui à ce jour est mon médecin traitant. Renouvellement d’ordonnance, suivi médical, écoute… Merci ! encore une étape de franchie, ce qui me rassure.

Je dois avouer que ce qui me rassure moins, c’est la vie en collectivité.

Je suis lessivé. Ayant cessé de boire depuis 10 ans, il m’est difficile d’être au contact de consommateurs qui me ramènent en arrière et de me dire qu’à une époque moi aussi j’ai été « comme ça », sans compter les jours de cafard, de solitude, où la tentation peut réapparaître. De plus sans argent pour acheter du tabac - je suis gros fumeur - s’ajoute le manque qui s’accentue auprès des gens qui fument.
Les journées commencent souvent par des démarches. RSA. Divers documents. Ou bien je reste sur place. Heureusement grâce à quelqu’un qui m’offre quelques toiles et de la peinture, j’ai repris goût au dessin, même si parfois, dans le bruit de la salle commune, ce n’est pas évident. A 20 heures c’est le retour en chambre pour avoir un semblant de silence, lire et me reposer.

Merci à l’équipe, malgré mon impatience, et le mal être que j’ai pu ressentir, de m’avoir épaulé, aidé efficacement.

Bon nombre de fois j’ai exprimé le fait que je n’étais pas bien, au bord de craquer, me renfermant sur moi-même, et malgré tout ce monde présent dans la maison ils étaient là tous, mon référent certes, mais tous à l’écoute, toujours un petit moment pour chacun.

Quand l’ambiance est devenue trop pesante, ils m’ont trouvé un lieu plus calme et j’ai peint de plus belle, je me suis reposé.

Maintenant, même si j’y repasse souvent, car je n’oublie jamais ceux qui m’aident dans la détresse, je vis ailleurs grâce à eux, je vais mieux. Bien sûr ça n’est pas encore ça, j’ai encore du chemin à faire avec quelques ornières, des moments difficiles, des coups de blues, mes impatiences car je suis encore en collectivité et que j’aspire à être enfin seul...

Mais si je devais apporter une conclusion à tout cela, je dirais que La Passerelle et les gens qui y travaillent représentent un « tremplin », et que si l’on se prête aux conseils qui nous sont donnés, on redémarre.

J’aurai passé 48 jours avec vous, qui parfois quand on ne va pas bien semblent interminables mais au fond j’ai eu beaucoup de chance de vous rencontrer, « messieurs dames » et ne vous remercierai jamais assez.

Quant à ceux qui suivront je leur souhaite de saisir la même chance. Merci à tous.

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