Depuis septembre 2013, Elisabeth est infirmière à la maison d’accueil des Augustins. Elle nous présente son travail :
Le poste que j’occupe actuellement est lié à l’ouverture des lits « Halte Soins Santé », conçus pour accueillir des personnes sans domicile ayant besoin d’un suivi médical ou post-opératoire. En attendant que ces lits soient financés, je travaille à mi-temps, pour accompagner les 40 résidents des Augustins.
Ma première mission a été d’écouter les résidents et de créer une relation de confiance avec eux, avant de leur faire des soins. J’ai rencontré chaque résident pour faire le point sur son état de santé : avait-t-il un médecin traitant, un traitement à suivre ? Des examens médicaux à faire ? Puis, ils sont venus me voir ou bien je suis venue les voir dans leurs chambres.
Pas une journée ne se ressemble. Mardi matin par exemple, j’ai rencontré huit résidents. Deux d’entre eux venaient de subir une intervention chirurgicale. Un autre, Monsieur C., sortait d'une cure de sevrage ; nous avons pris le temps de parler de ce qui s’était passé pendant la cure, et j’ai regardé avec lui s’il avait un traitement à suivre. Ensuite j’ai pris la tension de Monsieur D. qui doit être surveillée deux fois par semaine. Il pourrait faire appel à une infirmière libérale, mais il ne serait pas remboursé. Il m’arrive aussi d’encourager des résidents à rencontrer leur médecin traitant, faire un examen qui leur a été prescrit, ou se rendre au laboratoire pour une prise de sang. C’est beaucoup d’éducation finalement. Il faut expliquer tout ce qui touche au médical pour « désangoisser » jeunes et moins jeunes, les aider à devenir plus autonomes.
Je m’appuie sur mes expériences passées pour évaluer l’état clinique ou psychosomatique de la personne. Quand un résident dit qu’il est angoissé ou qu’il a mal au ventre par exemple, j’essaie de comprendre ce qu’il y a derrière : essaie-t-il de repousser un rendez-vous qu’il appréhende, chez le médecin ou avec le juge d’application des peines ? ou bien est-il vraiment malade ? C’est arrivé l’autre jour avec un jeune ; cette fois-ci, il était vraiment malade alors j’ai appelé SOS médecin.
La plupart des résidents suivent un traitement, pour des problèmes cardiaques, des insuffisances respiratoires, des troubles psychiques ou en substitution à la drogue. J’ai préparé jusqu’à 9 piluliers pour les 40 résidants. Même quand je travaillais à domicile, je n’en avais pas autant.
Je prends soin des résidents pour qu’ils prennent soin d’eux. Il faut se montrer attentif, pour repérer des détails, des indices qui pourraient passer inaperçus. Par exemple, quand quelqu’un « se laisse aller », cesse de se raser, s’habille avec moins de soin que d’habitude, ça peut être le signe d’un état dépressif qui s’installe ou qui s’aggrave. Dans ces cas-là, je téléphone au médecin traitant, au psychiatre, au CMP* ou j’informe mes collègues, avec qui j’ai des réunions régulières. Je suis aussi en lien avec des infirmières libérales, et celles qui travaillent pour d’autres associations, notamment dans la lutte contre les addictions.
Pour que le projet des résidents aboutisse il faut qu’ils soient bien dans leur corps et dans leur tête. Prendre soin d’eux, les aider à se remettre debout, c’est quelque chose. Pour moi l’Îlot est une très belle structure, parce qu’elle prend en compte toute la personne avec son histoire, ses craintes, ses espoirs, ses obligations, pour l’accompagner dans son projet de vie. Un résident, ce n’est pas simplement un dossier à suivre, mais une personne à accompagner jusqu’au bout, avec une équipe médico-socio-éducative.
C’est ce qui m’a décidée à travailler aux Augustins. Je partage les valeurs de l’Îlot, qui "croit en l'Homme, en sa capacité à réagir, à se prendre en main lorsqu'il est meurtri, rejeté, en situation de précarité ou d'exclusion".
*CMP : centre médico-psychologique