Comment êtes-vous arrivé ici, à Chemin Vert ?
J’ai 34 ans. Je suis arrivé le 15 novembre 2011, sous bracelet électronique. Au départ, j’avais demandé à être placé en semi-liberté. C’est ma conseillère qui m’a orienté vers le bracelet… et ce n’est pas plus mal parce que j’ai atterri ici. En semi-liberté, c’est encore un peu la prison, il y a du personnel pénitentiaire… mais ici c’est autre chose. Il n’y a pas de surveillant, et surtout on a accès à une chambre individuelle, c’est important. La conseillère que j’avais en prison était très bien, c’est elle qui m’a orienté ici, elle m’a bien aidé. Le bracelet, je l’ai gardé 4 mois et demi, je l’ai enlevé le 3 avril 2012. Porter ce truc à la cheville, ça fait bizarre, surtout les premiers jours, et puis je me suis habitué. Avec un bracelet il faut se programmer, pour respecter les horaires. C’est une contrainte qui m’a permis de préparer la suite. Au départ le bracelet était prévu pour plus longtemps, mais j’ai tout fait pour que ça se passe bien : il n’y a jamais eu d’incident. Quand j’avais 10 minutes de retard, j’appelais tout de suite.
Vous vous apprêtez à "voler de vos propres ailes"...
Quand j’ai obtenu la liberté conditionnelle, j’étais encore en stage dans un commerce de véhicules. Ce stage m’a montré comment travailler… j’ai regardé comment ils faisaient. Et le 7 mai 2012 j’ai monté ma propre entreprise. Je voulais être indépendant, et je voulais tenter ma chance. Tout s’est fait ici. Mon activité c’est l’achat et la revente de véhicules, mais surtout la location pour l’instant. Au début c’était dur. Pendant 6 mois il ne s’est pas passé grand-chose, mais je savais qu’il fallait persévérer. L’activité a vraiment démarré en 2013. Je me suis fait des cartes de visites, et j’ai mis en place un système de factures pour que tout soit clair. Au début, je travaillais en partenariat avec une personne rencontrée pendant mon stage. Et puis le 20 novembre 2013 j’ai obtenu l’accord pour l’achat d’un véhicule en crédit-bail, que je propose en location pour le week-end ou la semaine. Je compte en prendre un deuxième à la fin de l’année… Le bouche-à-oreille commence à fonctionner ! Et là, j’ai rendez-vous, cet après-midi, pour visiter un logement. Comme je courais partout, j’ai un peu négligé cet aspect.
Avec le recul, comment voyez-vous votre parcours ?
Quand j’ai obtenu ma première voiture, je me suis dit : « mais pourquoi je n’ai pas fait ça avant ? ». Mais avant, je manquais d’information, et puis je pensais différemment. Ma dernière affaire, c’était en 2007. A l’époque, j’étais différent. J’ai pris 5 ans. Quand ils m’ont mis en prison ça a été un choc. J’avais déjà fait de la prison avant, deux fois. Mais là, ce qui m’a frappé c’est que le procureur avait demandé 5 ans et que le juge l’a suivi. Il voulait que je reste un peu ! Quand j’ai vu que les surveillants de la maison d’arrêt commençaient à m’appeler « l’ancien », ça m’a fait quelque chose. Je voyais des jeunes de 19, 20 ans, qui se comportaient mal… tout ça m’a fatigué. Rien que pour ça il ne fallait plus que je revienne. Et puis il y avait mon fils. A l’époque, il avait 3 ans. Pour moi cette dernière peine de prison a été positive : j’ai réfléchi à beaucoup de choses. Depuis que je suis dehors, en liberté, les finances ce n’est pas trop ça mais je préfère rester dehors.
Vos impressions sur l'association ?
Un endroit comme celui-ci aide les gens à prendre leur indépendance. En sortant de prison, s’il faut rentrer chez ses parents ou vivre chez des amis, il peut vite y avoir du conflit. Ici c’est un bon tremplin pour prendre sa vie en main.